Apprendre à lire en maternelle ? C’est une blague ? Eh bien non, c’est même plutôt naturel. Mais pourquoi donc proposer aux enfants d’entrer dans la lecture dès 2-3 ans ? Et comment faire ? Je vous livre mes conseils inspirés de ma formation auprès de l’institut Apprendre Montessori de Sylvie d’Esclaibes et du livre de Céline Alvarez, Les Lois naturelles de l’enfant, ainsi que des nombreuses vidéos qu’elle met à disposition.
J’ai pu appliquer tout ou partie des étapes ci-dessous en CP, avec des groupes de 6 ou 7 enfants qui ne parvenaient pas à entrer dans la lecture. J’ai également utilisé ces temps clés avec des GS et des MS. Avec les TPS et PS, nous avons essentiellement travaillé la discrimination auditive et visuelle et l’association phonèmes et graphèmes. Je regrette de ne pas avoir eu le temps, ni les moyens (humains) d’aller plus loin en classe de TPS et TPS/PS. Mais si vous le faites à la maison, avec votre enfant, vous verrez que vous pouvez mener l’ensemble des étapes ci-dessous en quelques mois.
Pourquoi apprendre à lire dès la maternelle ?
Entre 0 et 6 ans, les enfants traversent la période sensible du langage. Cette tranche d’âge est donc propice à tous les apprentissages en lien avec le langage, et donc naturellement la lecture. Durant cette période, les notions liées au langage se construiront de manière facile et durable pour la majorité des enfants, si l’adulte sait répondre à ses besoins.
Proposez à vos enfants de façon naturelle, des jeux pour éduquer leur ouïe (et du même coup, leur attention et concentration). Petit à petit, passez aux sons que font les lettres. L’alphabet ? Laissez tomber, on n’a pas besoin de connaître l’alphabet pour apprendre à lire. Par contre, on doit savoir comment les graphèmes chantent. En entrant par le son des lettres, vous allez susciter la curiosité des enfants qui vont vouloir en savoir plus et vont commencer à s’intéresser au langage écrit.
Suivez leur élan, leur motivation. Peut-être que votre enfant sera très intéressé par les sons et les lettres pendant un mois, puis il passera à autre chose avant d’y revenir. Un des intérêts de proposer l’apprentissage de la lecture dès la maternelle aux enfants, c’est qu’ils ont trois ans pour développer les compétences en la matière, contre un an en CP. Leur plasticité cérébrale est par ailleurs encore bien performante à cet âge.
Enfin, sauf blocage psychologique (déracinement, peur que papa ou maman ne lise plus d’histoires le soir – c’est du vécu avec mon aîné – , etc.), l’enfant étant en réussite dans le décodage de petits mots simples, dans leur encodage, puis dans la lecture de livres adaptés à son niveau, il se réjouit, prend confiance en lui. Quoi de plus beau que la fierté de son enfant.
Les 4 étapes pour apprendre à lire en maternelle… et au CP
#1 – Discrimination auditive, prérequis indispensable pour apprendre à lire en maternelle
En TPS/PS, je vous renvoie à l’article sur les jeux de sons et la phonologie pour éduquer l’oreille dès le plus jeune âge.
Je reviens ici sur le jeu « Mon petit œil a vu ».
Dans un premier temps, je mène ce jeu avec 3 sons d’attaque voyelle, jusqu’à ce que les enfants entendent et comprennent ce à quoi ils doivent être attentifs.
Puis j’introduis, toujours en son d’attaque, des consonnes. Pas plus de 3 consonnes nouvelles à la fois.
Une fois que les enfants entendent l’ensemble des sons d’attaque principaux (enfin ceux pour lesquels nous disposons de petits objets), on peut passer aux sons finaux.
Puis, on peut travailler les sons à l’intérieur des mots.
Une fois que les enfants sont à l’aise avec cette discrimination des phonèmes, on peut complexifier ce jeu qu’ils aiment bien avec mettant bien plus que 3 objets.
#2 – Association graphème/phonème
Lors d’une séance, après avoir joué à « mon petit œil a vu », je propose de découvrir les graphèmes des phonèmes travaillés. Je propose ces graphèmes sous forme de lettres rugueuses, en bâtons ou en script ou en cursive, selon là où vous en êtes avec les enfants et le matériel dont vous disposez.
Si vous n’avez pas de lettres rugueuses, prenez celles d’un alphabet mobile.
Dans un premier temps, présentez chacun des 3 graphèmes et les sons associés. Puis proposez à chaque enfant de passer son doigt sur la lettre en suivant son tracé, tout en répétant le son qu’elle fait.
Donnez à chaque enfant des petits objets dont les sons d’attaque correspondent aux graphèmes travaillés. À eux de poser les objets sur le graphème correspondant.
Lors de la séance suivante, on peut reprendre des graphèmes connus et ajoutez ceux étudiés le jour même.
Bien sûr, tant lors du jeu « mon petit œil a vu » que lors de cette association phonème / graphème, on soutient l’enfant. On lui répète le mot s’il ne se le rappelle plus en articulant bien, en insistant sur le son à entendre. On lui propose de répéter, de vocaliser à son tour, afin que cela devienne un automatisme pour lui.
#3 – Encodage : écrire des mots, des phrases
Quand l’enfant sait associer phonème et graphème, on peut lui proposer des dictées muettes ou non muettes. Muettes, cela signifie qu’il peut travailler seul, que l’adulte n’a pas à lui « dicter » le mot. Par contre, on peut s’assurer avec lui qu’il a bien les bons mots par rapport aux images qu’on lui propose pour la dictée muette. Il peut ensuite travailler en autonomie, et même s’autocorriger si on laisse une correction à disposition.
Pour limiter la charge cognitive de l’élève, il est préférable dans un premier temps de lui proposer un alphabet mobile avec lequel composer les mots. Vous pouvez utiliser :
- des lettres majuscules en bois qu’on trouve au rayon scrapbooking ;
- des lettres dans la police de votre choix que vous imprimez, plastifiez et découpez ;
- les lettres magnétiques de Céline Alvarez ;
- des lettres autocollantes, collées sur de la cartonnette puis plastifiées : c’est ce que montre la photo ci-dessous. Les lettres ont été réalisées à partir des autocollants disponibles dans le cahier d’activités de Céline Alvarez.
Pour les mots, vous pouvez proposer des petits objets, puis passer à des photos. Suivez la progression des séries roses et bleues Montessori. Vous trouverez des ressources à télécharger chez Terre de partage.
Dans un premier temps, on choisit des mots de 2 lettres dans lesquels tous les graphèmes chantent. Puis, on passe aux mots de 3 lettres, avec également, tous les sons chantants. Puis, on augmente la difficulté, toujours en suivant les mots qui seront ensuite proposés en décodage / compréhension.
L’objectif est de mettre l’enfant en confiance, d’automatiser l’encodage / décodage. Quand il se sentira à l’aise, il ira de lui-même écrire les mots dont il a envie et lire des phrases.
#4 – Décodage et compréhension
Je travaille avec les séries roses Montessori. J’avais trouvé une version en cursive, mais si votre enfant n’a pas encore vu cette écriture, proposez-lui des versions en lettres bâtons, voire en script. Soyons honnête, on ne lit quasiment rien en cursif. Vous trouverez une formidable ressource pour les séries roses Montessori sur le site de Cocon-Schooling.
Dans les écoles de Sylvie d’Esclaibes qui proposent un enseignement bilingue, c’est le script qui prévaut. Parce que dans les pays anglo-saxons, tout le monde lit et écrit en script.
Dans la version que j’utilisais, j’appréciais l’autocorrection rendue possible par le collage au dos de la photo, du mot correspondant. Il suffisait à l’enfant de retourner la photo pour vérifier s’il avait bien lu et compris le mot et donc choisi la bonne image.
Avec le memory des mots de Céline Alvarez, je propose 5activités progressives à retrouver dans cette vidéo sur l’entrée dans la lecture.
Quand l’enfant est à l’aise avec les séries roses, en encodage et décodage, vous pouvez passer aux séries bleues et vertes, puis à la lecture de phrases, puis de livres premières lectures.
Vous pouvez en parallèle proposer des petits jeux comme les mots secrets : l’enfant pioche une étiquette mot ou une phrase, selon son niveau. Il va coller le mot sur l’objet correspondant (mur, vase, table, chaise, canapé, etc.) et exécute ce que dit la phrase piochée.
Pour les livres de premières lectures, quand j’ai enseigné en CP, avant de me former à la pédagogie Montessori et avant que Céline Alvarez ne partage ses vidéos, j’utilisais la méthode Ratus… un peu désuète aujourd’hui au niveau des illustrations… Mais j’appréciais les petites histoires à lire de la collection Toutes premières lectures. Voici deux titres qui furent bien usés :
Puis, j’ai mis la main sur une collection de livres des éditions PEMF, « Histoire de mots ». Petit florilège de mes préférés, mais certains ne sont plus édités et de nouveaux titres sortent chaque année. J’ai aimé leur structure répétitive sur laquelle le lecteur débutant peut prendre appui :
Enfin sont arrivés les imagiers proposés par Céline Alvarez, puis les contes et fables pour les lecteurs débutants dans la collection des lectures naturelles :
- Mon imagier niveau 1 et Mon imagier niveau 2 (avec digrammes) ;
- Les lectures naturelles
Vous avez des questions ? N’hésitez pas à me les laisser en commentaire ou à me rejoindre sur le compte instagram Mes Petits Curieux pour me les poser en DM.
Les liens vers les ouvrages sont des liens affiliés Decitre. Les livres ne coûtent pas plus cher pour vous, mais Decitre me reverse quelques centimes sur chaque vente. L’effet cumulé peut me permettre de payer l’hébergement du blog.
4 Responses
o3s575